L’environnement familial d’Abélard ont fait depuis les
dernières décennies l’objet de plusieurs travaux, notamment de la part de deux
chercheurs européens, une Britannique, Brenda M. Cook (Mrs Dawtry)[1],
et un Autrichien, M. Werner Robl[2] :
leurs recherches les ont amené à proposer des hypothèses très stimulantes, dont
nous avons fait notre profit dans notre approche de la question des origines du
père du philosophe ; mais nos propres conjectures se révèlent légèrement différentes.
***
Dans le récit autobiographique qui raconte l’histoire de ses
malheurs, Abélard, on le sait, déclare explicitement être originaire au Pallet,
qu’il décrit comme un oppidum – le
terme, associé ici avec le participe parfait constructum, doit sans doute
être entendu avec le sens de « place-forte » – et qu’il situe à
une distance de huit milles à l’est de Nantes, à l’entrée même de la Bretagne (Ego igitur, oppido quodam oriundus quod in
ingressu minoris Britannie constructum, ab urbe Namnetica versus orientem octo
credo miliariis remotum, proprio vocabulo Palatium appellatur) : Abélard
souligne qu’il doit à la nature de son pays aussi bien qu’à la race à laquelle
il appartient son caractère léger et ses facilités intellectuelles pour les
études littéraires (sicut natura terre
mee vel generis animo levis, ita et ingenio extiti et ad litteratoriam
disciplinam facilis). Cependant, les formules qu’il utilisera par la suite
pour parler de ses relations avec sa patria
ne permettent pas de déterminer avec certitude s’il désigne par ce terme le
Pallet stricto sensu ou bien un ensemble
territorial plus vaste couvert par l’ombre portée du donjon du lieu. En tout
état de cause, Abélard eut été fort étonné de lire sous la plume de certains
commentateurs modernes que la légèreté et l’intelligence dont il était
redevable aux siens et à sa terre natale caractérisaient en conséquence les
Bretons et la Bretagne, qu’il considère à bien des égards comme gens et contrée
horribles ! Le mieux est sans doute de s’en tenir à son épitaphe composée
par son contemporain Richard de Poitiers qui le désigne comme un Nantais né d’un
père poitevin et d’une mère bretonne (Nannetis
oritur, patre Pictavus et Brito matre)[3].
Abélard nous indique que son père, qui s’appelait Bérenger,
était un chevalier ; mais ce personnage avait été instruit dans le domaine
des lettres avant d’entrer dans la carrière des armes et s’était montré en
conséquence particulièrement disposé à ce que ses fils, dont Abélard était
l’aîné et le préféré, bénéficiassent à leur tour d’une éducation littéraire
avant de recevoir eux aussi une formation chevaleresque (Patrem autem habebam litteris aliquantulum imbutum antequam militari
cingulo insigniretur; unde postmodum tanto litteras amore complexus est, ut
quoscumque filios haberet, litteris antequam armis instrui disponeret. Sicque
profecto actum est. Me itaque primogenitum suum quanto cariorem habebat tanto
diligentius erudiri curavit). Ce profil de miles litteratus s’est surtout développé sous l’influence des
Plantagenêts, à partir de la seconde moitié du XIIe siècle[4] ;
mais on en trouve des attestations précoces dans le comté de Nantes, dès l’époque
à laquelle vivait Bérenger : c’est notamment le cas d’un certain Rouaud (Rodoaldus quidam miles litteratus), dont
une donation à Marmoutier, où il avait revêtu l’habit de saint Benoît, fut à l’origine,
vers la fin du XIe siècle, de la fondation du prieuré de Pontchâteau[5].
En tout état de cause, disposer de cette « double compétence »
permettait la réorientation à point nommé d’une carrière, comme cela avait été
probablement le cas pour les frères puînés d’Abélard, après que ce dernier leur
eût abandonné, avec son héritage et son droit d’aînesse, le faste de la gloire
militaire (ut militaris glorie pompam cum
hereditate et prerogativa primogenitorum meorum fratribus derelinquens).
Toujours au témoignage d’Abélard, Bérenger, à une date
inconnue qui peut, au demeurant, avoir précédé de plusieurs années la décision
similaire prise par Luce, sa femme, avait, à l’instar de Rouaud, pris l’habit
monastique (Dum vero hec agerentur,
karissima mihi mater mea Lucia repatriare me compulit; que videlicet post
conversionem Berengarii patris mei ad professionem monasticam, idem facere
disponebat) ; mais Abélard n’indique pas quels furent les monastères
qui avaient respectivement accueilli son père et sa mère. Ultime information
fournie sur sa famille par Abélard, cette fois dans sa Dialectica : un de ses frères s’appelait Dagobert et avait
plusieurs fils que le philosophe désigne comme ses neveux ; c’est à sa
demande et à leur intention qu’il avait écrit cet ouvrage[6],
preuve que la tradition des études littéraires ne se perdait pas au sein de la
famille. Par ailleurs, le nécrologe de l’abbaye du Paraclet mentionne,
malheureusement sans indication d’année, les obits de plusieurs parents
d’Abélard : deux nièces, Agnès, qui fut prieure du monastère (Agnes priorissa), et une religieuse
nommée Agathe (Agatha Deo sacrata) ;
un autre frère, Raoul (Radulphus), et
une sœur, Denise (Dyonisia) ;
enfin, une certaine Luce, sa mère
peut-être (Lucia mater magistri nostri
Petri) ou bien, plus vraisemblablement nous semble-t-il, une cousine
moniale qui portait le même nom (Lucia
monaca, magistri nostri Petri cognata). En outre, on a pu conjecturer avec
une assez grande probabilité l’existence d’un troisième frère, Porchaire, chanoine
de la cathédrale de Nantes, mentionné parmi les destinataires d’une bulle
d’Innocent II en 1137 et dont un acte du cartulaire de Buzay aux années
1153-1157, relatif à une vigne que Porchaire avait donnée au monastère (vineam quandem prope molendina Constancii
sitam, quam scilicet Porcharius, Nannetensis ecclesiae canonicus, cum apud
Buzeium monachus fieret, ejusdem loci monachis pro anima sua dederat), nous
apprend qu’il était l’oncle d’un certain Astralabe, lui aussi chanoine de
Nantes (Astralabius, canonicus
Nannetensis, nepos ejus), identifié depuis longtemps avec le fils d’Abélard[7].
***
Le terme « palais » (palatium), qui avait passé depuis longtemps en toponyme permet de
postuler avec une assez grande probabilité l’existence au Pallet durant le haut
Moyen Âge d’une résidence royale, rouage administratif essentiel à cette époque ;
mais avons-nous affaire en l’occurrence à une extension vers le sud du
« système palatial franc » de la Gaule septentrionale[8],
« palais » pour lequel nous disposons peut-être d’une attestation de
l’époque carolingienne[9] ?
Ou bien s’agit-il d’un vestige de l’organisation politique mise en place par
les Wisigoths, qui, au Ve siècle, dominaient toutes les cités de
l’Aquitaine seconde, jusqu’à la Loire, et pouvaient en avoir délégué localement l’administration
à d’autres « Barbares », les Taifales par exemple[10] ?
La question mérite d’autant plus d’être posée que « la Gaule du Sud au Ve
siècle en général et l’Aquitaine wisigothique en particulier demeurent si peu
étudiées en France », comme le rappelle Christine Delaplace dans un très
intéressant ouvrage qui vient heureusement combler pour partie ce déficit[11].
En tout état de cause, force est de
constater, en Espagne tout du moins, que si les Wisigoths réutilisaient à
l’occasion des constructions romaines, aucun de leurs palais n’a pu être identifié
jusqu’à présent[12]. Quant
à l’hypothèse que le Pallet fût jadis le siège d’un évêque nommé Pierre, qui
participa au concile réuni à Agde en 506 à l’initiative d’Alaric II[13],
elle a fait long feu[14].
On peut remarquer que la situation géographique s’accorde bien avec la
proximité de frontières de nature politique qui, à l’époque d’Abélard, ne
pouvaient être évidemment que celles avec l’Anjou et le Poitou, comme il se
verra encore au bas Moyen Âge avec le système complexe des « marches »[15]
; mais il faut également envisager que cet environnement complexe constituait
peut-être, au moins pour partie, le prolongement de l’intégration de l’ancien pagus de Tiffauges, au détriment de sa
personnalité propre, dans une entité plus vaste, dont la destinée devait se révéler
particulièrement mouvementée[16].
De plus, la topographie du Pallet, au confluent
de deux rivières, permet de supposer l’existence précoce d’un point de
traversée, à pont et à gué, plutôt orienté nord-sud, si l’on accepte la
tradition qui signale localement le passage d’un itinéraire antique de Nantes à
Poitiers ; lieu de péage et de collecte de taxes, mais aussi emplacement
de foires et de marchés.
Nous connaissons plusieurs individus appartenant
indiscutablement à l’aristocratie qui ont porté le nom du Pallet (de Palatio) pendant une période d’une soixantaine
d’années environ autour de l’année 1100 : outre un certain Gaudin, le plus
ancien peut-être d’entre eux, mais dont le statut n’apparait pas clairement[17],
se sont ainsi succédé Daniel (Daniel,
Danihel), que B. M. Cook suggère d’identifier avec le père de Luce[18],
puis Hervé (Herveus) et enfin Main (Mein),
lequel, nous dit-on, pourrait avoir été fils de Dagobert[19].
En plus d’une extrapolation généalogique incertaine à partir d’une étymologie
discutable du nom d’Abélard[20],
le principal biais de la reconstitution proposée consiste, nous semble-t-il,
dans le fait qu’elle ne donne aucune place à Hervé – dont il est avéré pourtant qu’il se maria et eut
postérité[21] – tandis
qu’elle valorise le personnage de Luce, dont l’appartenance à la famille du
Pallet n’est cependant pas établie. Il faut également noter que Daniel, Hervé
et Main, dont nous ne connaissons pas la fonction exacte exercée au Pallet, où
ils font plutôt figure de « châtelains » que de véritables « seigneurs »
du lieu, apparaissent avant tout, dans les actes qui nous ont conservé leurs
traces, comme les clients de
dynasties seigneuriales plus puissantes établies dans les Mauges voisines, en
particulier celle du Petit-Montrevault[22],
et peut-être celle de Beaupréau[23] :
il est tentant de supposer qu’ils pouvaient, en conséquence, avoir été
eux-mêmes originaires ou du moins habitués de cette région[24],
comme c’était déjà le cas de Gaudin[25].
Cela ne remet pas en cause leur fidélité à l’égard des comtes de Nantes, qui s’observe
sans ambiguïté dans un acte en faveur de Sainte-Croix de Quimperlé, passé à
Nantes conjointement par le duc Alain et son frère le comte Mathias peu après
la mort de leur père : Daniel du Pallet (Daniel de Palatio) est en effet mentionné le deuxième au nombre des
témoins laïques ; mais, là encore, l’imprégnation bretonne du Pallet
n’apparait guère marquée, d’autant que les Nantais (Namnetenses) ont été soigneusement distingués des Bretons (de Britonibus) et inscrits avant ceux-ci
dans la liste des témoins[26].
***
C’est dans ce contexte que la mention d’un certain Bérenger de Aula dans le cartulaire de
Saint-Serge-et-Saint-Bach d’Angers prend un singulier relief : ce
personnage, qui se déclare « cassé de vieillesse et tout ennuyé d'aller à
la guerre pour le service de ses maîtres et seigneurs », s'adresse à
l'abbé Bernard et lui demande l'habit de religieux « afin de pouvoir faire
pénitence des fautes et excès qu'il avait commis au service de ses maîtres » ;
et pour obtenir plus aisément ce qu'il souhaite, Bérenger prie le fils de
défunt Roger du Petit-Montrevault d'intercéder pour lui et de lui obtenir cette
faveur ; ce dont ce seigneur s’exécute volontiers et offre à cette
occasion à l’abbaye une terre proche du prieuré de Villeneuve[27].
L’acte en question n’a pas été conservé et n’est donc connu
que par une analyse d’érudit, peut-être Dom Housseau, faite à l’époque moderne ;
mais son authenticité n’est pas discutée. Sa date de temps n’est pas précisée ;
mais la rédaction est vraisemblablement intervenue au tout début du XIIe
siècle[28].
A la suite de W. Robl[29],
même si nous ne suivons pas toutes les conclusions de ce chercheur, nous
croyons reconnaître en Bérenger de Aula
le père d’Abélard : l’époque à laquelle cet acte a été passé n’est pas
incompatible, comme nous l’avons dit plus haut, avec le témoignage
d’Abélard sur l’entrée successive de ses parents en religion. Par
ailleurs, on a rappelé les liens forts qui unissaient, autour du sanctuaire de
Villeneuve en particulier, les membres de la famille du Pallet et les seigneurs
du Petit-Montrevault, liens qui peuvent s’être étendus aux membres de leur militia castri respective : le
mariage du père d’Abélard avec une Bretonne serait ainsi une conséquence de son
appartenance à la garnison de la forteresse du Pallet, mais ne nécessite
nullement que Luce appartînt au lignage des châtelains du lieu, ou, plus
précisément, qu’elle en fût l’héritière. En revanche, il nous semble que faire
fond sur la forme « de la Cour », par laquelle Dom Housseau, ou un
autre mauriste, a rendu le latin de Aula
risque d’amener à des conclusions fallacieuses : il ne sert à rien en
effet de constater l’absence d’un toponyme « La Cour » dans les
Mauges (ce qui est exact), pas plus qu’il n’est pertinent d’en déduire que la
désignation de Aula accolée au nom de
Bérenger pourrait constituer un synonyme tardif de palatium[30],
puisqu’aussi bien c’est le mot « salle » qui, dans la toponymie, sert
le plus souvent à rendre le terme aula,
– que d’ailleurs on trouve plusieurs lieux-dits « La Salle » dans les
Mauges, – et qu’il est possible d’avancer quelques raisons en faveur de La
Salle de Jallais, qui conservait le souvenir d’un château disparu vers la fin
du XIIIe siècle.
En effet, c’est à Jallais que l’on trouve, sur la rive droite
du ruisseau de Montatais lequel formait, en aval, l’un des quatre côtés de la
Salle[31],
le lieu-dit Béranger ou Baranger, qui renvoie à la mention vers l’An Mil d’une terra que est vocitata de Barra Berangerii
dans une charte du prieuré de Chemillé[32] :
par ce terme de « barre », il faut entendre une maison fortifiée,
possible demeure d’un chevalier chasé, qui lui aura donné son nom ; d’autre
part, tout porte à croire que l’ancienne paroisse de Jallais, héritière d’une villa gallo-romaine, englobait à
l’origine celles de La Jubaudière et de La Poitevinière[33].
Cette dernière, attestée sous les formes Pictavineria
au tournant des XIe-XIIe siècles, Pictaveneria en 1138[34],
ne peut avoir reçu son nom qu’après la fin de son appartenance stricte au
Poitou : quelle serait en effet la raison pour laquelle le domaine, occupé
par quelqu’un que son origine désignait comme un « Poitevin », aurait
été dénommé « La Poitevinière », s’il était situé dans une région par
ailleurs peuplée de Poitevins[35] ?
En revanche, on sait combien, pendant une longue période avant leur intégration
définitive au comté d’Anjou et au diocèse d’Angers, les Mauges ont été l’objet
de confrontations entre les principautés limitrophes et rivales. Les comtes de
Poitiers ont évidemment essayé à plusieurs reprises de revenir sur le
démembrement, imposé-consenti, des pagi
septentrionaux de leur principauté : la forte implantation dans les Mauges
d’un personnage assez mystérieux, Renaud Torench, par ailleurs vicomte d’Anjou,
semble résulter, au moins partiellement, d’un tel épisode de reprise en main
poitevine, à la fin du Xe siècle[36].
Ainsi pourrait s’expliquer, dans les décennies suivantes, l’immigration de
Poitevins dans des terroirs qui, appartenant originellement au Poitou
historique, étaient passés depuis sous contrôle angevin : la paroisse de La
Poitevinière, enfoncée comme un coin entre trois toponymes L’Angevinière
signalés respectivement à Gesté, La Pommeraye et Saint-Lézin, marquerait alors
le point d’avancée extrême de cette tentative de « colonisation »[37].
En tout état de cause, les origines poitevines du père d’Abélard,
connues de Richard de Poitiers, sont peut-être à rechercher dans les Mauges, à
l’instar de la maison, dépendante de Saint-Serge-et-Saint-Bach, où, sous l’habit
monastique, Bérenger de la Salle attendit sa naissance à la vie éternelle.
André-Yves Bourgès
[1]
B. Cook, « Abelard and Heloise. Some notes towards a family tree », Genealogists’ Magazine, vol. 6, n° 26
(June 1999), p. 205-211 (voir en particulier le tableau généalogique qui figure
p. 206).
[2]
W. Robl, Zwischen Gottfried Graumantel
und Peter Abaelard: Der Donjon von Le Pallet und seine Herren im Spiegel der
Zeitgeschichte, Neustadt an der Waldnaab, 2006.
[3]
É. Berger, Notices sur divers manuscrits
de la Bibliothèque Vaticane - Richard le Poitevin, moine de Cluny, historien et
poète, Paris, 1879, p. 135.
[4]
X. Storelli, Le chevalier et la mort dans
l’historiographie anglo-normande (XIe siècle – début du XIIIe
siècle) Thèse d’histoire médiévale
sous la direction du Professeur Martin Aurell, Université de Poitiers, 2009, p.
103.
[5]
P.-H. Morice, Mémoires pour servir à
l’histoire… de Bretagne, t. 1, paris, 1742, col. 471-473.
[6]
At uero, cum uoluminis quantitatem mentis
imaginatione collustro et simul quae facta sunt respicio et quae facienda sunt
penso, poenitet, frater Dagoberte, petitionibus tuis assensum praestitisse ac
tantum agendi negotium praesumpsisse.
Sed cum lasso mihi iam et scribendo fatigato tuae memoria caritatis ac nepotum
disciplinae desiderium occurrit, uestri statim contemplatione mihi blandiente
languor omnis mentis discedit et animatur uirtus ex amore quae pigra fuerat ex
labore, ac quasi iam reiectum onus in humeros rursus caritas tollit et
corroboratur ex desiderio quae languebat ex fastidio.
[7]
Bulletin de la Société des bibliophiles
bretons et de l’histoire de Bretagne, 4e année (1880-1881),
Nantes, 1881, p. 50-51.
[8]
Voir l’éclairage apporté par les travaux de J. Barbier, en particulier son
article fondateur sur « Le système palatial franc: genèse et
fonctionnement dans le nord-ouest du regnum »,
Bibliothèque de l'Ecole des Chartes,
t.148 (1990) p. 245-299.
[9] L. Bourgeois et J.-F. Boyer, « Les
palais carolingiens d’Aquitaine : genèse, implantation et destin », L.
Bourgeois et Ch. Rémy (éd.), Demeurer,
défendre et paraître : orientations récentes de l’archéologie des
fortifications et des résidences aristocratiques médiévales entre Loire et
Pyrénées - Actes du colloque de Chauvigny, 14-16 juin 2012, Chauvigny, 2014
(Association des Publications chauvinoises, 57), p. 100 : « Un diplôme de Pépin Ier
pour l’évêque d’Angers est expédié le 25 décembre 837 depuis Palatiolo (…)… Ce Palatiolo pourrait correspondre au Pallet (Loire-Atlantique), même
si le diminutif originel n’apparaît plus dans les formes postérieures. Cette
localité établie à la confluence de la Sèvre Nantaise et de la Sanguèze faisait
alors partie de la civitas de Poitiers.
Le fait que Pépin chasse l’année suivante dans la forestis de Rocheservière permet, en effet, d’envisager l’existence
d’une résidence royale en Bas-Poitou ». Nous privilégions la
« solution alternative » proposée par les auteurs, laquelle « serait
d’identifier Palatiolo à Panazol,
portion de l’ensemble fiscal du Palais-sur-Vienne, dont la forme primitive
pourrait correspondre au toponyme du diplôme de 838. Il serait alors possible
d’y reconnaître une annexe du palais de Jucundiacum,
annexe qui aurait été située sur la rive gauche de la Vienne, où se trouvait
l’essentiel des domaines fiscaux associés et, notamment, la forêt
royale ».
[10] L.
Bourgeois, Propos recueillis par A.-G. Truong, « De si discrets
Barbares », L’actualité
Poitou-Charente, n° 76 (2e trimestre 2007), p. 30.
[11] Ch.
Delaplace, La fin de l’Empire romain
d’Occident - Rome et les Wisigoths de 382 à 531, Rennes, 2015, p. 9.
[12]
J. Arce, « The So-Called visigothic “Palatium” of Recópolis (Spain): An
Archaeological and Historical Analysis », M. Featherstone, J.-M. Spieser,
G. Tanman & U. Wulf-Rheidt, (ed.), The
Emperor’s House. Palaces from Augustus to the Age of Absolutism,
Berlin, 2015, p. 63-70.
[13]
L’hypothèse remonte au moins à l’abbé Travers, à qui l’avait reprise J.-B.
Ogée, Dictionnaire historique et
géographique de la province de Bretagne, t. 2, Nantes, 1779, p. 391.
Repoussée par P. de Berthou en 1910, délaissée depuis par tous les historiens
qui ont travaillé sur le concile d’Agde, elle a été ravivée et actualisée à l’occasion
de la mise en ligne d’une page dédiée sur l’excellent site Internet consacré à
Pierre Abélard : http://www.pierre-abelard.com/pat-Agde.htm
(consulté le 7 juin 2016), mais sans entrainer une véritable adhésion.
[14]
En revanche, il nous paraît envisageable qu’Adelfius
episcopus de Ratiate, qui figurait au concile d’Orléans de 511, ait été le
titulaire du siège de Poitiers ; le prélat aurait été transféré à Rézé après
la bataille de Vouillé (507) : cf. R.W. Mathisen, Ruricius of Limoges and Friends: A Collection of Letters from
Visigothic Aquitania, Liverpool, 1999, p. 21, n. 12.
[15]
Nous partageons la prudence dont fait preuve E. Chénon, « Les marches
séparantes d’Anjou, Bretagne et Poitou », Nouvelle revue historique de droit français et étranger, 1892, p.
25-30, qui semble privilégier l’hypothèse d’une solution de continuité entre la
situation du Xe siècle et l’état définitif des marches tel qu’il est
possible de le dresser à partir des documents des XVe et XVIe siècles.
[16]
A ce propos, la thèse demeurée inédite de J.-P. Brunterch L'extension du ressort politique et religieux du Nantais au Sud de la
Loire : essai sur les origines de la dislocation du pagus d'Herbauge (IXe
siècle-960), dont les positions sont consultables dans le livret École nationale des chartes. Positions des
thèses soutenues par les élèves de la promotion de 1981 pour obtenir le diplôme
d’archiviste paléographe, Paris, 1981, p. 39-49, a été récemment complétée
par le mémoire de maîtrise de T. Verron, travail qui, lui, a fait l’objet d’une
publication sous le titre L’intégration
des Mauges à l’Anjou au XIe siècle, Limoges, 2007 (Cahiers de
l’Institut d’anthropologie politique, 15) ; mais, dans un cas comme dans
l’autre, ces excellents travaux n’ont examiné le cas du pagus de Tiffauges qu’à la marge.
[17]
T. Verron, L’intégration des Mauges…,
p. 310-311 : la disparité des témoins mentionnés dans la liste (p. 311) où
figure Gaudinus de Palatio ne permet
pas de se prononcer avec certitude à ce sujet.
[18]
B. Cook, « Abelard and Heloise… », p. 209.
[19]
Ibidem, p. 210.
[20]
Quand bien même ce nom pourrait être effectivement considéré comme un composé de
ab (< breton mab, « fils ») et d’un anthroponyme de type Aalard, Aelard, Alard – hypothèse ancienne,
puisqu’on la trouve déjà sous la plume de Guibert de Tournai vers 1260 (Petrum filium Alardi quem Abaelard vocant),
mais qui, malgré le regain d’intérêt dont elle a fait l’objet, principalement
sous la plume de Renan, reste cependant à démontrer – il semblerait étrange que
le philosophe eût été le seul de son lignage à l’avoir porté, sans compter que
son père s’appelait Bérenger, comme on l’a vu, et non Alard.
[21]
Y. Chauvin (éd.), Cartulaires de l'abbaye
Saint-Serge et Saint-Bach d'Angers (XIe et XIIe siècles), t. 2, Angers, 1997, t. 2, page
453-455 : Hervé avait épousé la fille aînée d’un certain Geoffroi de Saint-Quentin
et de cette union étaient nés plusieurs enfants. A la demande de leur père, ceux-ci,
garçons et filles, procèdent, en même temps que leur mère, à une donation en faveur de Saint-Serge-et-Saint-Bach
d’Angers de différents revenus et biens situés à proximité du prieuré de
Villeneuve et au Puiset (Hec omnia
Herveus uxori sue et filiis et filiabus concedere fecit) ; cette
donation, originellement voulue par leur oncle maternel, Gui de Saint-Quentin,
qui sollicitait de prendre l’habit monastique à l’abbaye, est confirmée par
Paien du Petit-Montrevault qui s’en proclame le tutor.
[22]
Outre un acte concernant le sanctuaire de Villeneuve, qui nous paraît trancher
la question (voir infra n. 24), Daniel figure à deux reprises en qualité de
témoin dans des actes qui concernent les membres de la familia des seigneurs du Petit-Montrevault : voir Y. Chauvin
(éd.), Cartulaires…, t. 2, p. 425-426
et 467-469. Par ailleurs, lorsqu’il accepte à la demande de l’abbé Bernard de
renoncer aux droits qu’il détient à Champtoceaux et à Nantes sur la navigation des bateaux des moines de
Marmoutier, Daniel doit en obtenir confirmation de Roger du Petit-Montrevault, qui
exerce le dominium de Champtoceaux,
ainsi que du comte Mathias : voir T. Verron, L’intégration des Mauges…, p. 312-313. Roger du Petit-Montrevault
était à l’époque le tuteur du seigneur de Champtoceaux, son neveu par alliance,
Thibaut de Jarzé, pendant la minorité de ce dernier.
[23]
P. Anger (éd.), « Cartulaire de l'abbaye de Saint-Sulpice-la-Forêt »,
Bulletin et mémoires de la Société archéologique
du département d’Ille-et-Vilaine, t. 39 (1909), p. 21-24 (charte n°
220) : cet acte, daté 1138, consigne l’accord passé, en présence du
seigneur de Beaupréau, Jocelin, et de nombreux témoins dont Main du Pallet (Mein de Palatio), entre les moines de
Saint-Serge-et-Saint-Bach d’Angers et les moniales de Saint-Sulpice de Rennes, au sujet d’une terre de landes située à la
Pierre-Aubrée, entre Beaupréau et Montrevault.
[24]
Leur intérêt pour le sanctuaire de Villeneuve, fondation partagée entre les
seigneurs des deux Montrevault et dont Daniel, détenait, avant d’en faire
donation à Saint-Serge-et-Saint-Bach d’Angers, la moitié de la commendatio, sans doute au titre de
« client » de la dynastie du Petit-Montrevault, constitue, à notre
opinion, un indice de cet enracinement, lequel apparaît donc antérieur à
l’alliance locale contractée par Hervé, qui est venue le renforcer : voir
T. Verron, L’intégration des Mauges…,
p. 99-101.
[25]
Voir supra n. 17. Gaudin est témoin des décisions prises à l’occasion de la tenue à Sainte-Christine de la cour (curia) de Roger du Petit-Montrevault,
pour régler une affaire concernant Saint-Quentin-en-Mauges.
[26]
L. Maître et P. de Berthou (éd.), Cartulaire
de l’abbaye de Sainte-Croix de Quimperlé, 2e éd., Rennes-Paris,
1904 (Bibliothèque bretonne armoricaine, 4), p. 173.
[27] Y.
Chauvin (éd.), Cartulaires…, t. 1, p.
114-115.
[28] La
datation proposée par l’éditeur correspond à l’abbatiat de Bernard : 27
mars 1093-6 avril 1102.
[29] W.
Robl, Der Donjon von Le Pallet, p.
231-235.
[30] Ibidem,
p. 232-233.
[31] M.
Cailleau, Jallais, son histoire,
Maulévrier, 1994, p. 13
[32] C.
Port, Dictionnaire historique
géographique et biographique de Maine-et-Loire, t. 1, Paris-Angers, 1874,
p. 198 et 315.
[33]
T. Verron, L’intégration des Mauges…,
p. 45.
[34]
C. Port, Dictionnaire…, t. 3,
Paris-Angers, 1878, p. 134.
[35]
La vérification peut s’en faire aisément puisque sur les dix autres
toponymes La Poitevinière mentionnés par C. Port, neuf se trouvent au nord de
la Loire et donc indiscutablement hors du Poitou ; le dixième est situé dans
la commune de Drain, immédiatement au sud de la Loire, à proximité de
Champtoceaux.
[36]
O. Guillot, Le comte d'Anjou et son
entourage au XIe siècle, t. 1, Paris, 1972, p. 203-209.
[37]
Nous reprenons ici partiellement une intéressante hypothèse de P. Duplessis, « Le cheval merveilleux de Jallais
(Maine-et-Loire). Les apports de la mythologie à la connaissance des limites de
la cité des Andes », M. Percot (dir.), Histoire
locale, rencontres d'Ancenis, 26-28 novembre 1999, Nantes, 2001, p.
127-139, hypothèse que son auteur peine, à notre avis, à contextualiser
chronologiquement.
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